Au milieu de la nef aux ornements gothiques
Des anges, en essaim, vers Dieu prennent l’essor.
A travers les vitraux aux visages mystiques
En cette fin du jour filtre un long rayon d’or.
Une veilleuse tremble au fond d’un lampadaire
Et le tiède rayon au sein du sanctuaire
Évoque Murillo contemplant la beauté
Du sublime tableau : « De Christ ressuscité. »
L’orgue vibre ; sa voix invisible a des ailes
Et monte comme une âme aux gloires éternelles.
Au prélude arpégé d’une plainte en mineur
Succède, en rythme pur, un andante rêveur.
Le clair de lune à la forêt semble sourire
Et la biche, soudain, tressaille aux sons des cors,
Une harmonie exquise accompagne une lyre
Et l’Ave Maria plane sur des accords.
J’entends du rossignol, les roulades perlées
Et la viole chante en larges envolées.
Une source qui jase au milieu des roseaux
Met sa pédale douce aux accents des pipeaux.
J’écoute du troupeaux les clochettes lointaines
Puis triste dans le glas, la basse du bourdon ;
Dans le miséréré pleurent les voix humaines,
Du Très-Haut, à genoux, implorant le pardon...
Le fracas du tonnerre augmente dans l’orage,
Des cris d’oiseaux craintifs meurent dans le jardin.
En gamme chromatique un souffle enfle sa rage
Et rythme avec entrain le tic-tac du moulin.
Le vent siffle et se plaint comme une voix qui pleure
« Je songe aux miséreux sans pain et sans demeure. »
Puis le flot qui s’avance en galop d’escadron
Au cœur met l’épouvante et fait pâlir le front.
Et l’extase renaît dans la nature entière.
Comme un encens divin s’élève une prière,
C’est un hymne de foi qui chante en notre cœur,
C’est l’hymne des chrétiens célébrant le Seigneur.
L’ivresse du printemps passe dans les clarine,
Le tambourin, la cornemuse et le hautbois.
Les cloches, en rosaire, égrènent les matines
Et la chanson des nids susurre dans le bois...
L’orgue vibre; sa voix invisible a des ailes
Et monte comme une âme aux gloires éternelles.
Émile TOSCANO
Source : l'Émulation française 1er janvier 1928
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