lundi 3 novembre 2025

Le Varinoporteur

 


🛞 Le Varinoporteur : la révolution à roulettes de l’abbé Varin !

Ah, 1924 ! Les barbes et moustaches sont impeccables, les soutanes bien repassées, et les curés inventent… des porte-colis roulants !

 L’abbé Jules Ernest Varin, génie inspiré du Concours Lépine, présente fièrement son Varinoporteur : un appareil si pratique, dit-on, que « même un enfant peut transporter la plus lourde valise ». Hélas, nul n’a jamais retrouvé le moindre dessin de cette prodigieuse machine : ni plan, ni croquis, ni ombre d’une roue sainte.

Était-ce un diabolique chariot à manivelle ? Une sorte de trottinette cléricale ? Ou un mini-autel roulant pour les messes en déplacement ? Le mystère demeure…

Ce que l’on sait, c’est que la presse de l’époque en raffolait : « Le public, le meilleur des juges, a trouvé dans cet appareil un élément véritable de confort et de bien-être ». Rien que ça ! On imagine déjà les fidèles sortir de la messe en se disputant pour tirer le Varinoporteur de Monsieur l’Abbé.

Vendu 75 francs (soit plus de 8 000 € actuels !), le précieux engin coûtait presque aussi cher qu’un petit orgue ! À ce prix-là, il devait au moins faire le catéchisme tout seul…

Alors, amis mélomanes, bricoleurs et nostalgiques des inventions improbables :
➡️ Qui veut de ce formidable colis roulant ?
Garanti sans péché… mais probablement sans frein non plus. 😄

 

Excelsior 13 septembre 1924

 

Le Petit Parisien 5 octobre 1924

 

🎵 Le Varinoporteur

Chanson comique en l’honneur de l’abbé Varin (1924) 

Couplet 1
Au concours Lépine un jour d’octobre,
Parmi les gadgets épatants,
Un saint abbé, l’œil clair et sobre,
S’avance en robe et fièrement :
« Voici l’Varinoporteur, mes frères !
Le colis roule sans douleur,
Finies les valises trop fières,
Place à la foi… et au moteur ! »

Refrain
Ohé, Varinoporteur,
Porteur de joie et de douceur !
Pour soixante-quinze francs d’époque,
C’est l’bon Dieu qui pousse ta baroque !
Huit mille euros d’not’ temps, mes sœurs,
Qui veut d’ce formidable bonheur ?
— Roule, roule, ô Varinoporteur !

Couplet 2
On dit qu’un gosse, même sans force,
Peut traîner d’ses mains innocentes
La plus lourde malle de noces
Ou l’orgue à vent de la paroiss’ tremblante !
La foule rit, le jury bronze,
Et l’abbé, d’un geste vainqueur,
S’incline en disant sa réponse :
« Merci, mes fils, gloire au Seigneur ! »

Refrain
Ohé, Varinoporteur,
Porteur d’paix et d’bonheur !
C’est l’saint-chariot d’la modernité,
Le miracle d’la mobilité !
Plus fort qu’un âne ou qu’un tracteur,
— Roule, roule, ô Varinoporteur !

Couplet 3 
On n’sait pas c’qu’il est, c’qu’il semble,
Ni s’il roulait très droit, d’ailleurs,
Mais tout l’monde riait, tout l’monde tremble
Devant l’esprit de l’inventeur.
Et si d’puis cent ans on s’interroge
Sur son secret mystérieux,
C’est qu’Varin fut, sans démagogie,
Un curé d’génie, glorieux !

Dernier refrain 
Ohé, Varinoporteur,
Saint véhicule du bonheur !
De l’abbé Varin, louons l’adresse,
Et sa soutane en allégresse !
Concours Lépine, quel honneur !
— Vive à jamais le Varinoporteur !

 ©dboissy (2025)

 


 

samedi 1 novembre 2025

La Varinette de l'abbé Varin


🎶 La Varinette, le « Roi des instruments » de l’abbé Varin

Un mirliton français entre violon, violoncelle et fantaisie populaire (1919-1930)

Dans les années 1920, alors que la France se relève de la Grande Guerre et que l’esprit d’invention bat son plein, un petit instrument connaît un succès aussi bref que retentissant : la Varinette. Présentée comme « le Roi des instruments », elle promettait à chacun de devenir un musicien, du ténor au baryton, de la basse au soprano — simplement en fredonnant !

Son inventeur, l’abbé Jules Ernest Varin (1875-1956), originaire de la Manche et curé de Saint-Laurent (Paris 10ᵉ), avait conçu ce singulier appareil en 1919. L’instrument fut aussitôt récompensé : médaille d’argent au concours Lépine, puis distinction à une exposition nationale.


Un instrument aussi simple qu’étonnant

La Varinette se présente comme un petit tube muni d’une membrane vibrante : un mirliton perfectionné, proche du kazoo, qui transforme la voix en timbres instrumentaux surprenants. Selon la notice publicitaire,

« par un simple fredonnement, on peut tirer de la Varinette des sons aussi mélodieux que ceux du violon, du violoncelle ou de la contrebasse, selon le registre de la voix. »
(L’Illustration économique et financière, 22 novembre 1924)

L’abbé Varin, homme de foi mais aussi de scène, organisait de véritables démonstrations publiques. Un article de L’Action Française du 29 juin 1919 rapporte ainsi :

« La Varinette vient de faire ses débuts dans les salons de l’Œuvre Saint-Luc, boulevard Saint-Germain, devant une assistance d’élite…
Ce petit instrument mérite bien son aimable conception. Dans un orchestre, la Varinette donne l’illusion du violon, du violoncelle ou de la contrebasse… »


Un succès populaire et pédagogique

La Varinette n’était pas un gadget isolé. L’abbé Varin voyait dans son invention un moyen d’expression universel et accessible à tous, y compris aux blessés de guerre, aux mutilés ou aux enfants :

« Un mutilé, même privé de ses deux bras, peut en tirer des effets musicaux surprenants. »
(L’Action Française, 1919)

L’instrument s’imposa rapidement dans les écoles, chorales et œuvres de jeunesse : plus de trois mille établissements en France l’auraient adopté, et sa diffusion atteignit plus de cent pays en moins de trois ans, selon la presse de l’époque.

Elle fut même introduite dans plusieurs églises et chapelles, où elle servait à accompagner les chants religieux, cantiques et faux-bourdons, preuve que la frontière entre instrument ludique et usage liturgique pouvait alors être franchie avec audace.


Entre jazz, sirènes et cocoricos

La Varinette sut aussi s’adapter à l’air du temps : dans un article amusé de La Liberté (26 juin 1919), le journaliste Jean Aubray s’exclame :

« La Varinette, primée au concours Lépine, est un petit instrument à la portée de tout le monde, et dont on peut tirer un jazz-band complet ! »

La notice vantait la capacité de l’instrument à imiter aussi bien les violons que les bruits du quotidien : cor de chasse, tambour, clairon, sirène, aboiement du chien, bêlement de la brebis ou miaulement du chat… Un véritable orchestre miniature de campagne et de ville !


L’abbé Varin, prêtre-inventeur et pédagogue

Moins connu aujourd’hui, l’abbé Jules Ernest Varin fut pourtant une figure attachante du clergé parisien. Né en 1875 dans la Manche, il exerça son ministère à Saint-Laurent, où il associait musique et pastorale.
Son invention visait autant à réjouir les âmes qu’à rééduquer les corps — elle s’inscrivait dans la veine humaniste et optimiste de l’après-guerre.

Si la Varinette finit par tomber dans l’oubli, éclipsée par les nouveautés du monde moderne, elle reste le témoin d’une époque où l’on croyait encore qu’un peu d’ingéniosité et de souffle pouvaient suffire à créer la beauté.


📯 En résumé

DateÉvénement
1919Invention de la Varinette, médaille d’argent au concours Lépine
1920– ca 1952Diffusion en France et à l’étranger ; usage scolaire, religieux et populaire
Abbé Jules Ernest Varin (1875-1956)Prêtre à Paris 10ᵉ, inventeur, pédagogue et musicien autodidacte
Nature de l’instrumentMirliton perfectionné : instrument à membrane vibrant par la voix
UsageImite violon, violoncelle, contrebasse, cor, tambour, etc. ; accompagne chants ou amusements

 

🎵 « Il suffit de fredonner »

La Varinette n’était ni violon ni violoncelle, mais elle en rêvait. Par sa simplicité, son humour et sa vocation inclusive, elle mérite aujourd’hui d’être redécouverte comme une curiosité sonore d’un temps où la musique voulait unir, instruire et réjouir.


Encart publicitaire d'époque

 
L'Abbé Varin (généalogie et documents) sur Geneanet
 

La chanson de la varinette

 


🎵 La chanson de la Varinette

Couplet 1

En mil neuf cent dix-neuf, à Paris Saint-Laurent,
Un abbé plein d’idées souffla gaiement dedans.
Il rêva d’un violon qu’on jouerait sans archet,
Et naquit, tout de go, la fameuse Varinette !

Refrain :
🎶 La Varinette, quel bijou !
On la fredonne, on s’y joue !
D’un souffle clair, d’un p’tit air tendre,
Elle fait chanter les cœurs à s’étendre !
Violoncelle ou violonnet,
Tout sort d’la bouche, et sans baguette !
Merci, merci, abbé Varin,
Pour ton miracle parisien !

Couplet 2

Aux blessés de la guerre, il offrit son secret,
Un son de joie légère, un rire en contrepoint discret.
Même sans bras, disait-il, on peut faire musique honnête,
Il suffit d’un souffle et d’une Varinette !

Refrain (idem)

Couplet 3

Dans les écoles, les chorales et les fêtes du pays,
Les enfants en chœur soufflaient comme un zéphyr ravi.
Et l’Europe fredonnait, amusée, conquise, coquette :
C’était le grand triomphe de la Varinette !

Refrain 
🎶 La Varinette, quel bijou !
Dans les salons, quel remous !
Un mirliton plein de tendresse,
Qui fait danser jusqu’aux duchesses !
Violoncelle ou violonnet,
Tout sort d’la bouche, et sans baguette !
Merci, merci, abbé Varin,
Pour ton miracle parisien !

Pont

« On l’entend au chœur d’saint Luc,
Au concours Lépine, c’est l’triomphe public !
Un p’tit tuyau, un peu d’membrane,
Et tout Paris s’en émerveille, nom d’un organe ! »

Dernier refrain 

🎵 La Varinette, doux trésor,
On t’entend encore !
Sous la poussière du temps, tu chantes,
Ta joie naïve et charmante.
Violoncelle ou violonnet,
Rêve envolé, p’tit mirliton parfait !
Merci, abbé Varin, pour ton idée divine :
La Varinette vit dans nos refrains !


©dboissy (2025)